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Canicules: Quels sont les risques et que faire pour les porcs en croissance ?

Les chaleurs d’été impactent durement les porcs en élevage; dans un précédent sujet, nous avions évoqué les risques et moyens de luttes concernant les truies et l’infertilité en été. Nous allons donc dans cet article nous intéresser aux porcs charcutiers qui sont parfois oubliés lorsqu’on parle de fortes chaleurs. Pourtant l’impact des canicules est tout aussi important sur eux!

Les mécanismes de thermorégulation du porc sont très limités car ils ne suent pas. Aux vues des canicules que l’on observe, il apparait que les porcs d’élevages vont être soumis tous les ans à de forts stress thermiques. Il est donc important de connaitre l’enjeu économique et de bien-être qui se cache derrière les étés à venir et quels sont les leviers d’action à notre disposition.

Les plages de confort thermal du porc en croissance

POIDSTEMPERATURE MINIMALE & MAXIMALTEMPERATURE RECOMMANDEE AU NIVEAU DES PORCS
PS: 5-13 kg29.4 à 23° C27° C
PS: 13-25 kg26 à 21° C23° C
Engraissement: 25-70 kg17° C à 24° C21° C
Engraissement: 70-100 kg16° C à 21° C18° C

Il est important de comprendre qu’il y a une différence entre la température réelle et la température ressentie par les animaux, et nous mêmes!

La température de confort thermique, ou température ressentie, dépend aussi de l’humidité relative: lorsque l’humidité relative augmente trop, les porcs tolèrent moins bien la chaleur. Le tableau ci-dessous montre pour un porc à l’engraissement le risque de stress thermique en fonction de la température et de l’humidité relative:

1. Impact économique :

 

Les principaux éléments économiques dégradés par le stress thermique sont comme suit:

– Diminution de l’ingéré quotidien,du GMQ et du TMP

– Augmentation de l’indice de consommation (IC)

– Mortalités lors de chaleurs sévères (par déshydratation, détresse respiratoire, arrêt cardiaque, etc…).

2. Qui est touché ?

La température corporelle est principalement produite par le métabolisme. Dans des conditions normales, cela permet au porc de maintenir sa température mais, en cas de forte chaleur, cet excès de production est mal ou peu évacuée, et comporte des risques.

Le phénomène s’aggrave chez les porcs avec des croissances très rapides dont le métabolisme est très intense et très producteur de chaleur (synthèse rapide de muscle). En d’autres terme, le porc est plus sensible aux chaleurs lorsque le GMQ est élevé. Ce sont donc logiquement, les charcutiers en croissance et particulièrement en finition qui sont les plus sensibles et les plus impactés par les canicules.

Néanmoins, il ne faut pas négliger l’impact sur les porcelets sevrés. L’une des principales conséquences du stress thermique est d’entraîner un stress dit oxydatif (production de radicaux livres et chute des anti-oxydants). Le porcelet sevré étant déjà soumis à un stress oxydatif (changement d’alimentation …), il est possible que celui-ci augmente si les températures sont excessives (plus de 30° pour un porcelet sevré) et les surveiller est donc nécessaire. Nous reviendrons sur le stress oxydatif plus tard.

3. Les mécanismes du porc pour supporter les chaleurs:

Lors des périodes de fortes chaleurs, les porcs vont changer de comportement. Pour diminuer l’impact des températures, ils vont s’allonger dans des zones fraîches, limiter leurs déplacements et perdre en appétit. C’est un signal d’alerte pour l’éleveur. Les porcs sont en situation de stress thermique.

Au niveau physiologique, ils vont boire davantage. A long terme, ce mécanisme est mauvais car les porcs perdent des électrolytes.

Pour augmenter les échanges thermiques, le sang est davantage redistribué vers la peau et moins vers les intestins, ce qui entraîne une mauvaise digestion d’où l’indice de consommation qui augmente. La fréquence respiratoire augmente (échange thermique en évacuant de l’air chaud et en absorbant du frais) et provoque une augmentation du pH sanguin (alcalose). Afin qu’il se rééquilibre, l’organisme consomme du bicarbonate, des protons et du calcium, ce qui, à terme, est néfaste pour le système nerveux et cardiaque.

A l’échelle métabolique, l’augmentation de l’insuline stimule la dégradation des réserves de glycogène et l’oxydation du glucose (respiration cellulaire). Ce métabolisme dit oxydatif produit des radicaux libres qui sont toxiques pour les cellules, ainsi que des protéines inflammatoires, telle la fibrine. En temps normal, le métabolisme oxydatif fonctionne pour permettre l’entretien des cellules,  et les radicaux libres sont captés ou détruits par les anti-oxydants naturellement présents. Les anti-oxydants sont de deux natures: des enzymes qui détruisent directement les radicaux libres, ou des grosses molécules qui sont oxydées par les radicaux libres en molécules moins toxiques. Les vitamines A, E et C en sont de bons exemples.

Ainsi, lors de stress thermique, au lieu d’avoir un dépôt musculaire (formation de glycogène et dépôt de protéine), les muscles consomment leurs réserves via le métabolisme oxydatif, ayant pour conséquence une diminution du TMP, la production de molécules inflammatoires et des radicaux libres (qui nuisent au bon fonctionnement et à l’intégralité des cellules et diminuent le système immunitaire).

4. Moyens de lutte:

Les principaux moyens de lutte contre le stress thermique et la baisse des performances vont s’axer autour de trois axes: améliorer le confort du bâtiment, faciliter l’ingestion et la digestibilité de l’aliment pour limiter les baisses de performance et combattre les effets négatifs du stress oxydatif.

  • Le logement:
    • Brumisation ou « cooling »: l’eau fraiche en s’évaporant consomme de l’énergie (sous forme de chaleur). La brume s’évapore au niveau de la peau des animaux et pour le cooling, l’évaporation se fait à l’entrée du circuit d’air et rafraîchit l’air entrant.
      • Ces deux méthodes reposent sur l’évaporation de l’eau. Elles ne sont donc pas très efficaces lorsque l’humidité augmente. A moindre coût, il est possible d’arroser les animaux, les sols bétons et ventiler au maximum.
    • Isolation du toit et du bâtiment.
    • Arrosage du toit.
    • Ventilation pour assurer un renouvellement de l’air. L’air circulant permet  d’évacuer la chaleur par convection (-1° ressenti par 0.1m/s de vitesse d’air au-delà de 0.2 m/s).
    • Diminuer les densités autant que possible (détassage).

Pour les bâtiments sur paille, il peut-être nécessaire de racler les cases car le lisier est une source de chaleur importante et pailler davantage pour maintenir un environnement sec. En plein air, la présence d’arbre et/ou de zone humide est intéressante pour proposer au porc un endroit plus frais.

  • Conduite alimentaire:
    • Fractionnement des repas remis aux heures fraîches (évite l’effort en période de chaleur et meilleur appétit des porcs).
    • Distribution d’eau à volonté (même en soupe).
    • Concentration de l’aliment en diminuant les fibres, l’amidon et en augmentant les acides gras (leur digestion est moins productrice de chaleur car le rendement est meilleur).
  • Compléments alimentaires pour contrecarrer le stress oxydant:
    • Bicarbonate de soude pour limiter la perte d’électrolytes.
    • Apport d’anti-oxydant pour capter les radicaux libres et les métabolites du stress oxydatif lors des périodes à risque, soit dès le début des premières chaleurs sur les porcs en croissance et finition et sur les porcelets sevrés.

FORCIL

Composition:

Extraits de pépins de raisin, Vitamine C, Vitamine E

Mode d’emploi:

1 ml/10kg PV/j pendant 5 j aux début des canicules

 

 

 

 

GEO VIT C

Composition:

Vit C, Extraits végétaux, Lactose, Cabonate de calcium

Mode d’emploi:

2g/100 kg/j pendant 5j au début des canicules

 

 

 

 

 

 

 

 

Comme l’ingéré est assez faible durant les périodes de canicule, il peut-être intéressant d’administrer ces produits dans l’eau de boisson ou lors du repas d’eau.

Pour conclure, la gestion des fortes chaleurs est un enjeu important pour les années à venir. Pour l’instant, peu de données sont disponibles quant à un éventuel travail sur la génétique ( et encore faudrait-il que la résistance à la chaleur soit une caractéristique génétiquement transmissible, ce qui n’est pas encore bien déterminé).

Au bilan pour limiter les pertes économiques et améliorer le bien-être des porcs durant les fortes températures, il faut:

– Anticiper les chaleurs

– Adapter le logement

– Aider le porc à lutter contre le stress oxydatif via l’apport d’électrolytes et d’anti-oxydant.

Sources:
1) Godyń, D., Herbut, P., Angrecka, S., & Vieira, F. C. B. (2020b). Use of Different Cooling Methods in Pig Facilities to Alleviate the Effects of Heat Stress—A Review. Animals, 10(9), 1459. https://doi.org/10.3390/ani10091459
2) Hocquette, J. (2000). Métabolisme énergétique des muscles squelettiques chez les animaux producteurs de viande.
3) Renaudeau, D., Mandonnet, N., Tixier-Boichard, M., Noblet, J., & Bidanel, J. P. (2004). Atténuer les effets de la chaleur sur les performances des porcs : la voie génétique. INRA Productions Animales. https://doi.org/10.20870/productions-animales.2004.17.1.3556
4) Robert, F., Bebin, K., Garrau, J., & Garrel, C. (2009). Evaluation et correction du stress oxydatif du porcelet en post-sevrage.
5) Ross, J., Hale, B. J., Gabler, N. K., Rhoads, R. E., Keating, A. F., & Baumgard, L. H. (2015). Physiological consequences of heat stress in pigs. Animal Production Science, 55(12), 1381. https://doi.org/10.1071/an15267
6) Schiek S., 2019, Heat stress in swine affects production, https://extension.umn.edu/swine-production-management/heat-stress-swine-affects-production#effects-on-grow-finish-stage-of-production%C2%A0-255312
7) Spencer, J. R., Gaines, A. M., Berg, E. P., & Allee, G. (2005). Diet modifications to improve finishing pig growth performance and pork quality attributes during periods of heat stress1,2. Journal of Animal Science, 83(1), 243–254. https://doi.org/10.2527/2005.831243x
8) J. Smith et L. Eastwood, Comment éviter des pertes de production chez les porcs causées par le stress dû à la chaleur. (2022, màj 2023). ontario.ca. https://www.ontario.ca/fr/page/comment-eviter-des-pertes-de-production-chez-les-porcs-causees-par-le-stress-du-la-chaleur#:~:text=Les%20longs%20jours%20chauds%20et,industrie%20porcine%20des%20%C3%89tats%2DUni