En comparaison des truies, les verrats sont parfois oubliés dans les élevages. Loin de produire directement de la valeur directe, ils sont néanmoins nécessaires à bien des égards et ne doivent pas être négligés car ils peuvent aussi être des bombes à retardement d’un point de vue sanitaire.
Le verrat : Détecteur et stimulateur professionnel
Dès le sevrage ou son lendemain, le passage du verrat une fois par jour peut être un élément de stimulation pour les truies.
A partir de trois jours après le sevrage, son passage deux fois par jour permet de détecter les premières venues en chaleur. Sur les truies, on peut s’attendre à ce que ces chaleurs précoces s’accompagnent d’une ovulation plus tardive (elles ne nécessitent donc pas d’inséminer dans les plus brefs délais). Toutefois, l’adage “chaleur précoce, ovulation tardive” ne s’applique pas forcément aux cochettes, en particulier lorsqu’elles sont synchronisées artificiellement. Chez ces dernières, les chaleurs jugées “courtes” ou non vues peuvent résulter d’une venue précoce ou d’une détection trop tardive, d’où l’importance d’une détection précoce des chaleurs chez les cochettes. Ceci d’autant que l’ovulation des cochettes peut survenir plus tôt durant les chaleurs nécessitant parfois un protocole d’IA “spécial cochette” avec un délai raccourci entre la détection et la première insémination.
La détection du réflexe d’immobilisation est incontestablement plus précise avec un verrat. Les phéromones présentes dans la salive du verrat lui donnent une odeur particulière et le stimulus auditif produit par ses grognements stimule la production d’œstrogènes des truies. Cette double stimulation olfactive et auditive débouche sur le réflexe d’immobilisation si la truie est en chaleur. Sans ces stimuli du verrat, environ la moitié des truies ne s’immobilise pas ou peu ce qui aboutit à une évaluation imprécise de la période de chaleur (imprécision qui se répercute sur l’évaluation de l’ovulation et peut mettre en échec le protocole d’IA).
Pendant les IA, la présence du verrat présente plusieurs intérêts au-delà de la détection des chaleurs, elle permet aussi de stimuler la truie inséminée et donc maximiser le succès de l’IA.
Mais un bon verrat c’est quoi ?
La qualité de la détection est le nerf de la guerre pour avoir de la prolificité et limiter les pertes financières dûes à des retours en chaleur. Le rôle du verrat y est très important, alors on peut se demander qu’est qu’un bon verrat ?
Premièrement un bon verrat ce sont deux verrats ! Quelle que soit la taille de l’élevage, et pour plusieurs raisons, il est vivement conseillé d’avoir plus d’un verrat. Tout d’abord pour pouvoir parer à tout accident (blessure, mortalité subite juste avant la semaine d’IA…). Mais aussi pour proposer aux truies plusieurs mâles car toutes les truies ne sont pas réceptives de la même façon à tous les verrats (tous les goûts sont dans la nature!). Enfin, dans les verrateries de grande taille, il est nécessaire d’avoir plusieurs verrats pour garder un timing de détection raisonnable (ne pas dépasser 20-30 minutes de stimulation par verrat). De plus, une truie immobile ne le reste pas indéfiniment. Si une truie réagit au verrat A par stimulus auditif (grognements à l’autre bout de la verraterie), passé 20 minutes, lorsque le verrat A arrivera en contact groin à groin elle pourrait ne plus être immobile et ne pas être détectée en chaleur. L’usage d’un verrat B viendra stimuler à nouveau et différemment cette truie.
D’autres critères important pour garder un bon verrat sont :
- Un âge supérieur à 8 mois (pubère) ; penser à un successeur quand il arrive sur ses 1 an ; Un verrat de plus de 2 ans est considéré comme âgé.
- Un bon verrat salive beaucoup et émet une odeur forte et reconnaissable.
- Il ne doit pas être trop gras, avoir une bonne libido et doit avoir de bons aplombs.
- Il faut donc bien le rationner ! Ne pas le suralimenter permet d’éviter les problèmes précédents, ne pas le sous-alimenter pour qu’il reste concentré sur les truies lors des détections, et non sur le contenu de leurs auges …
- Un verrat apprivoisé : Afin de rester en sécurité lors des manipulations et de ne pas avoir d’appréhension pendant la détection. Il faut penser à apprivoiser le remplaçant pour pouvoir réformer l’ancien s’il vient à devenir agressif.
- Un verrat en bon état et en bonne santé (détail plus bas).
- Certains mentionnent de le faire saillir de temps en temps pour maintenir sa libido. Aucune démonstration formelle n’a été faite de ce fait, mais cela à été rapporté par un certain nombre d’éleveurs.
Conseil sur sa gestion : logement et organisation de son passage
Pour éviter des réflexes d’immobilisation en dehors de la séance de détection ou une habituation des truies, il est recommandé de loger le verrat à l’écart des truies sevrées ou en IA.
Afin de stimuler et détecter efficacement, il est recommandé qu’il détecte à l’avant des truies et sur 5 emplacements à la fois. Le verrat peut aussi avoir ses préférences en matière de truie (éviter une truie et rester fixe devant une autre). Aussi pour que chaque truie soit stimulée, il est recommandé d’assister le verrat dans son parcours en le bloquant, soit avec des barrières, soit à l’aide d’ un chariot.
Par ailleurs, certains éléments réglementaires sont aussi à appliquer au verrat : mise en liberté, présence d’un objet manipulable et contact visuel avec des congénères.
Prévention sanitaire
Du fait de son contact très rapproché avec l’ensemble des truies, il est crucial d’intégrer les verrats au protocole vaccinal orienté sur la santé des truies.
Si c’est un verrat acheté, son passage par la quarantaine est obligatoire. Il peut donc recevoir un schéma vaccinal similaire à celui des cochettes. Si c’est un verrat produit par l’élevage, il faut penser à l’intégrer à un schéma de primovaccination.
Pour rappel les valences d’intérêt dans la relation de santé truies/verrats sont : le parvovirus, le rouget, le circovirus porcin de type 2, le mycoplasme, la grippe et le SDRP. Pour certains autovaccins ou d’autres valences spécifiques à l’élevage, une discussion avec votre vétérinaire permettra de déterminer si leur utilisation sur le verrat est nécessaire.
Il ne faut pas oublier d’autres traitements prophylactiques appliqués aux truies telle que la gestion de parasites internes et externes (vermifugation et anti-parasitaire externe).
L’utilisation du verrat pour de la monte naturelle est déconseillée pour des raisons principalement sanitaires mais aussi de performances techniques. Cependant la pratique de la monte occasionnelle perdure dans certains élevages. Attention néanmoins car presque toutes les maladies sont présentes dans la semence et il est alors d’autant plus crucial d’inclure le verrat dans la prophylaxie du troupeau.
Bien qu’avec l’insémination artificielle le verrat puisse paraître accessoire, il n’en reste pas moins un élément crucial du troupeau. Il assiste le travail de l’éleveur dans les détections, il permet d’évaluer finement et précisément les chaleurs et permet la réussite du protocole d’IA. Si l’espèce porcine est l’une des seules espèces où l’on atteint 90 à 100% de fertilité, c’est en partie grâce à la présence des verrats souffleurs qui permettent une grande précision dans le travail d’IA des éleveurs. Si toutefois la présence d’un verrat est impossible, l’utilisation des sprays de phéromones peut pallier son absence. En ayant un contact avec toutes les truies de toutes les bandes, il est aussi un élément à risque d’un point de vue de la biosécurité interne, il peut être un incubateur et vecteur pour la transmission de certaines maladies. Aussi, il doit impérativement être intégré à part entière au protocole de soin et de prévention du cheptel.