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La prise colostrale du porcelet

Importance de la prise colostrale pour le porcelet :

A la naissance, la prise de colostrum est essentielle pour le porcelet, elle joue différents rôles :

  • A court terme : elle apporte l’énergie nécessaire au porcelet pour faire face aux conditions de vie suite à la mise-bas (température, mouvements…). Le porcelet nait avec très peu de réserves graisseuses et sans poils d’où son importance.

Graphique représentant l’énergie disponible du porcelet (à gauche) et celle nécessaire pour la survie naissance-24h (à droite)[1]

  • A moyen terme : elle apporte les immunoglobulines (anticorps) et les cellules immunitaires de la mère. Ces anticorps protègeront le porcelet durant un à deux mois contre les agents pathogènes rencontrés par la truie ou ceux contre lesquelles elle a été vaccinée. Le porcelet naissant avec un système immunitaire naïf (lié à l’absence de transfert d’anticorps maternels au travers du placenta), cette prise colostrale est très importante.

NB : Le colostrum joue aussi un rôle de maturation du tube digestif.

La composition du colostrum évolue rapidement dans les 24h suivant le début de la mise-bas. En effet, la quantité d’anticorps (IgG) dans le colostrum diminue d’environ 50% en 12h.

Graphique présentant l’évolution de la concentration en IgG du colostrum dans les 36h suivant le début de la mise-bas [1].

Le porcelet doit ingérer au moins 200g (environ 160g/kg à la naissance) de colostrum durant ses premières 24h de vie afin de subvenir à ses besoins.

 

Déficit de prise colostrale : Quand et quelles conséquences ?

Plusieurs facteurs peuvent être à l’origine d’un déficit de prise colostrale :

Facteurs favorisant le déficit immunitaire des porcelets

TruiePorcelets
Quantité insuffisante
(dysgalactie post-partum)
Rang de naissance élevé
Qualité insuffisante
(chez les cochettes surtout)
Poids de naissance faible
Ne se laisse pas téterTaille de portée élevée
Défaut de vitalité
(difficulté d'accès à la mamelle)

Les conséquences d’une mauvaise prise colostrale sont : une difficulté plus ou moins importante à survivre à leurs premiers jours de vie et une plus grande sensibilité aux agents pathogènes.

Une étude [2] s’est intéressée au taux de mortalité sur les trois premières semaines de vie en fonction de l’immunité du porcelet à 24h. Il en ressort que les porcelets ayant un faible taux d’anticorps à 24h ont un taux de mortalité de 59%. A contrario, les porcelets ayant un taux d’anticorps suffisant à 24h ont un taux de mortalité de 6-7% sur les trois premières semaines de vie. D’où l’importance d’une bonne prise colostrale.

 

L’évaluation de la prise colostrale en élevage :

Lors de la semaine de mise-bas, certains points de cette prise colostrale peuvent être évalués.

La quantité de colostrum ingérée par les porcelets peut être évaluée à partir du gain de poids à 24h (GP24). Le protocole repose sur la pesée de chaque porcelet à deux moments : (i) à la naissance avant son premier repas et (ii) à 24h de la première pesée (ou le plus proche possible). Il faut penser à retirer le poids du cordon au poids à la naissance au risque de sous-estimer le GP24. La différence de ces deux pesées donne le gain de poids à 24h. Une formule permet, à partir des deux pesées, de retrouver la quantité de colostrum ingérée. Un GP24 de 50g ou plus est plutôt représentatif d’une bonne prise colostrale (mais les petits porcelets ont souvent besoin de plus) [2].

Pesée en élevage

NB : il est assez difficile d’évaluer la production de colostrum de la truie de façon directe. Cette production varie de 2 à 5kg selon les truies.

La qualité du colostrum peut être évaluée suite à un prélèvement au niveau des mamelles antérieures afin d’évaluer sa richesse en immunoglobulines.

Deux approches sont possibles :

L’utilisation d’un réfractomètre : déposer quelques gouttes dessus et lire le résultat obtenu (en % Brix, grille de conversion avec la notice).

  • L’analyse d’un échantillon de colostrum en laboratoire : évaluation de la quantité d’IgG par immunodiffusion ou ELISA.

 

Méthodes d’homogénéisation de la prise colostrale :

      Lorsque les truies ont de grandes portées, il faut s’assurer que tous les porcelets aient accès à la mamelle pour ingérer suffisamment de colostrum. Les porcelets de petite taille ainsi que les derniers nés nécessitent une attention particulière car ils sont plus susceptibles d’avoir une prise colostrale insuffisante.

NB : Durant les 10 à 12 heures suivant la mise-bas, la sécrétion de colostrum est continue. Par la suite elle devient cyclique, les porcelets ont des repas de colostrum toutes les 10 à 20 minutes.

Ces porcelets de petite taille et derniers nés sont très sensibles au froid. Il est important de les sécher rapidement et éventuellement de les mettre sous une lampe chauffante en respectant une température de consigne de 30°C à la sonde afin qu’ils soient dans de bonnes conditions thermiques pour aller téter le colostrum. En cas de compétition à la mamelle, lorsqu’il y a plus de 15 porcelets, la mise en place d’une tétée alternée favorisera l’accès à la mamelle par les porcelets plus faibles. Pour cela, il faut bloquer les 6 premiers nés (s’assurer qu’ils aient bien bu le colostrum et qu’ils aient le ventre bien rond) au chaud pendant une durée de 1 heure maximum.

Pour faire face à cette compétition à la mamelle, l’adoption de porcelets par des truies en même phase de lactation est réalisée en élevage. Une attention particulière doit être portée au « timing » de ces adoptions car cela peut aussi avoir conséquences sur l’immunité du porcelet. En effet, la truie transmet des cellules de l’immunité à ses porcelets de façon spécifique. Il ne faut donc pas faire d’adoptions avant 12h à 20h de vie [3]. Leur nombre doit aussi être limité (<15%) car cette pratique, bien que permettant de sauver des porcelets, a diverses conséquences sur les porcelets.

 

[1] Le Dividich J. et al. (2006b). The issue of colostrum in piglet survival : energy and immunity. Nutritional biotechnology in the feed and food industrie, pp.89-102

[2] LAUNAY, B. (2018). Evaluation pratique de la prise colostrale en élevage porcin. Thèse de doctorat vétérinaire. Faculté de Médecine, Nantes. ONIRIS, Ecole Nationale Vétérinaire, Agroalimentaire et de l’Alimentation Nantes Atlantique, page 37

[3] Bandrick et al. (2011). Effect of cross-fostering on transfert of maternal immunity to Mycoplama hyopneumoniea to piglets. Veterinary Record.